Chaque participante écrit la trame d'une histoire vraie concernant un MARIAGE ou UNE FETE DE FAMILLE. Puis on échange les feuilles. Avec la trame reçue, chacune écrit une histoire.
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Si on compte les parents, les frères et sœurs, les oncles et tantes, les cousins et les cousines, les familles du sud de l'Italie sont bien nombreuses. Alors pour se rendre en Suisse, au mariage de Salvatore, le seul de la famille qui a émigré, le clan de Pietro et Maria a pris un billet collectif et pas mal de victuailles pour se restaurer pendant ce long voyage. En Suisse on a réservé la salle communale pour les héberger.
Ils sont tranquillement installés dans le train, certains regardent le paysage, certaines tricotent ou crochètent mais tous bavardent avec animation :
- Le Salvatore n'a pas seulement trouvé un travail en Suisse, le malin il y a trouvé une épouse !
- Et oui et avec l'épouse il a trouvé un permis pour y rester, en Suisse !
- Et puis si elle est suissesse, sa femme, elle a un prénom de chez nous, Patrizia !
Dans son coin le futur beau-père se rappelle les rondeurs et pourtant la délicatesse de la silhouette de son épouse d'il y a 35 ans. Il regarde avec nostalgie ce qu'est devenue Maria qui l'a tant fait rêver. La petite suissesse doit être bien jolie pour avoir charmé son fils. La photo qu'ils ont reçue d'elle, vue de dos se tournant vers le photographe, ne laisse rien deviner, mais elle a un joli sourire... ce « rien » le fait fantasmer.
Il pense à Salvatore, ce fils cadet dont il envie la place. Pouvoir enlacer une femme au corps ferme, à la taille fine, aux hanches et aux seins généreux, aux fesses haut placées et bien pommées... comme Maria il y a bien longtemps. Puis il baisse les yeux vers sa grosse bedaine, soupire, oui le temps a passé. Il s'endort bercé par le rythme du train.
A Cornavin, la délégation du sud de l'Italie envahit le quai. Salvatore et Patricia sont là pour les accueillir. Le moment est difficile pour la jeune femme qui ne connaît personne. Chacun et chacune l'embrasse avec effusion, certains la tiennent à bout de bras pour la jauger, l'examiner de haut en bas et retour vers ses yeux verts. Elle entend quelques appréciations :
- Che bella ! ou bien
- Che bellissima !
Et certains se contentent de sourire.
Le beau-père est un peu déçu, elle n'est pas conforme à ses fantasmes, pas comme sa Maria. En matière de goût pour les femmes, on ne peut pas dire : tel père, tel fils, dommage !
Installation, derniers préparatifs, mairie, église tout se passe bien. Les voilà rassemblés autour du repas au menu mi suisse, mi italien et les plats se marient bien, le Désaley et le Chianti rincent généreusement les gosiers. Tout le monde s'échauffe, parle de plus en plus fort et braille des chansons paillardes que Patricia ne comprend pas, les rires et les ricanements fusent.
Salvatore fait tout pour que Patricia se sente bien et à l'aise malgré cette majorité venant du sud des Alpes. Le moment d'ouvrir le bal est venu. Il entraîne sa belle sur la piste et tout le monde les suit.
Après quelques danses le beau-père revendique le droit de faire danser Patricia, elle se soumet à cette tradition sans plaisir. Pietro a beaucoup bu, il est transpirant et en plus il l'a serre sur son gros ventre. Elle resent un immense dégoût, tente de le tenir à bonne distance. Pietro s'offusque. De ses grosses pattes, avec rudesse il baisse le joli bustier blanc de Patricia et hurle :
- Regardez tous, regardez comme ils sont petits ses tétons ! trop petits pour la main d'un bon italien !
La musique d'arrête, tout le monde se tait, immobile et médusé. Patricia éclate en sanglot et tente de remettre en place son bustier malmené. Salvatore blanc de colère avance vers son père comme un automate et de ses bonnes mains d'italien il lui décroche un coup de poing dans la figure et un autre dans son ventre mou. Pietro vomit son trop plein de nourriture et de vin. Les « Ah » et les « Oh » sortent péniblement des gorges serrées, les mains se plaquent devant les bouches. Salvatore somme son père de s'excuser, ce qu'il peine à faire. Sa mâchoire endolorie l'empêche de bien articuler et s'excuser ne fait partie de ses coutumes personnelles. Le patriarche n'a-t-il pas toujours raison ?
Patricia pleure dans les bras de sa mère. Maria l'enlace également pour la réconforter et lui demander d'excuser son terrible mari. Puis se retournant vers lui, elle se met à hurler et à gesticuler. Patricia ne comprend pas tout, mais cela paraît une longue litanie de reproches contenus pendant de longues années, une vomissure de couleuvres avalées et une volée de poings sortis de ses poches. Mais les deux derniers mots sont très clairs :
- Divorce immédiat !
Pendant ce long monologue Salvatore frotte ses poings endoloris puis prend sa femme dans ses bras, lui murmure quelques paroles pour calmer ses larmes. Il dépose sa veste sur ses épaules et l'emmène vers la vie qu'ils se sont promis ne saluant personne.
Un couple tout neuf regarde vers demain, un vieux couple éclate.
Maria regarde Pietro avec tout le mépris dont elle est capable, elle souffle comme un taureau vainqueur après le combat et va s'asseoir vers la belle-mère de son fils, reniant sa famille. Elle est soulagée d'avoir dit tout ce qu'elle gardait en elle.
L'orchestre range les instruments, chacun et chacune se prépare à quitter la salle de réception. Le train pour le sud de l'Italie ne part que lundi matin... que vont-ils faire si la fête est déjà finie ? Ils aimeraient déjà être de retour.
La trame que j'ai reçue : Patricia, une suissesse, épouse un italien du sud, Salvatore. Lors du repas de mariage où se trouvent une centaine de convives, le père du marié soulève le bustier de la mariée pour se moquer de la taille (petite) des seins de sa nouvelle belle-fille. Celle-ci, mortifiée, fond en larmes. (histoire hélas vraie !)